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1106-Club littéraire / FA Savard - par Raymonde_Michaud
Félix-Antoine Savard (1996-1982)
" Menaud, maître Draveur "
Félix-Antoine Savard est né à Québec le 31 août 1896.
Il a fait son cours secondaire puis son cours de théologie à Chicoutimi. Ordonné prêtre le 4 juin 1922, il est alors nommé au séminaire de Chicoutimi où il enseigne jusqu’en 1927. Il sera par la suite curé fondateur de la paroisse Saint-Philippe de Clermont, comté de Charlevoix. Durant quelques années, il est nommé prêtre colonisateur en Abitibi. En 1943, il devient professeur à la faculté des lettres de l’université Laval, à Québec, puis doyen de la même faculté de 1950 à 1957, et ensuite nommé prélat domestique (1) en 1950.
Il sera plusieurs fois président de la société du parler français mais aussi de la société de géographie, fondatrice avec Luc Lacourcière et Marius Barbeau des archives de folklore de l’université Laval. La figure de Mgr Savard, ecclésiastique et universitaire, rappelle celles de Camille Roy(2) et Lionel Groulx(3), mais à la différence de ceux-ci, elle sera célébrée par les écrivains de la génération suivante, notamment à travers le personnage de Menaud. Le portrait qu’en fait André Major (4) en 1968 en témoigne : on y voit « un homme trapu, le visage à la fois bon, viril et sensuel, vêtu d’une lourde pelisse de castor, coiffé d’un bonnet de fourrure, qui marche sur la neige durcie en s’appuyant sur une canne noueuse » et qui pourrait être le vieux maître-draveur.
Le plus souvent, on lit « Menaud, maître-draveur », comme l’épopée de la nation dépossédée, le chant de la défaite et surtout un réveil des consciences. Menaud est un draveur qui lutte contre la mainmise des compagnies étrangères sur les territoires québécois défrichés par les pionniers. Menaud veut transmettre ses valeurs à ses deux enfants : Joson, qui meurt accidentellement dans la rivière, et Marie, courtisée par « un personnage (le Délié) qui incarne le traître, puisqu’il est au service d’une des compagnies étrangères. Marie refusera finalement sa main au Délié et épousera un ami de son frère. Mais l’avenir de Menaud reste hanté par le fantasme de l’échec, comme si tout allait malheureusement changer « au pays du Québec ». Menaud sombre en effet dans la folie après avoir cherché en vain à livrer combat avec le Délié, qui s’est enfui dans la montagne. La folie de Menaud effraie les villageois : « des hommes (Â…..) se passaient la main sur le front contre les frôlements de cette démence »- , et Josime, le sage voisin, commente : C’est pas une folie comme les autres ! Cà me dit, à moi, que c’est un avertissement ».
Mais cette folie peut se lire autrement, comme l’a montré dès 1966 André Brochu(5), qui fait de Menaud un curieux intermédiaire entre les personnages de « Maria Chapdelaine et Trente Arpents »(6) Il souligne l’aspect tragique du sentiment d’appartenance : « aucune conciliation (Â…Â…) entre les univers de la femme et de l’homme, de la maison et de la montagne, entre les valeurs de la vie sédentaire et de la vie nomade (Â….), entre (Â…..) la vie de la chair et la fidélité du sang, il y a divorce radical ». Menaud est étrangement passif .Dès le début du roman, on le voit en train d’écouter des passages de Maria Chapdelaine lus à haute voix par sa fille (appelée justement Marie) et transmis tels quels dans le roman de Savard. Le roman de Louis Hémon est un véritable « bréviaire », comme le note Brochu. Menaud ressemble ainsi au Don Quichotte de Cervantès qui lit tellement de romans de chevalerie qu’il finit par confondre le monde livresque et le monde réel. Maria Chapdelaine devient pour Menaud un livre sacré, comme s’il remplaçait la Bible et structurait son rapport au réel. Il en résulte un roman très différent du réalisme sobre de Louis Hémon.
Plus qu’un hommage ou une suite, " Menaud, maître-draveur " est une dramatisation lyrique de Maria Chapdelaine. Savard durcit les éléments constitutifs du roman de Louis Hémon, tant les personnages que les valeurs qu’ils incarnent .C’est d’ailleurs la troisième des voix qu’entend Menaud, celle du devoir de survivance dicté par l’histoire. Ainsi, chez Savard, l’abandon de la terre a plus les traits menaçants, du Délié, cynique et vendu au plus offrant. De même, si la mort de François Paradis « écarté » dans la neige garde quelque chose de la douceur d’un évanouissement, l’engloutissement de Joson dans la rivière donne lieu à une scène d’un tellurisme violent exemplaire du style de " Menaud, maître-draveur ".
Menaud se leva. Devant lui hurlait la rivière en bête qui veut tuer.
Mais il ne put qu’étreindre du regard l’enfant qui s’en allait, contre lequel tout se dressait haineusement,
Comme des loups quand ils cernent le chevreuil enneigé.
Cela s’agriffait, plongeait, remontait dans le culbutis meurtrierÂ….
Puis tout disparut dans les gueules du torrent engloutisseur.
Menaud fit quelques pas en arrière ; et, comme un boeuf qu’on assomme, s’écroula, le visage dans le noir des mousses froides.
(extrait de Menaud, Maître-draveur, de Félix-Antoine Savard)
" Menaud, maître-draveur " est sûrement un des titres les plus illustres qu’ait à offrir la littérature canadienne française authentique. C’est un roman de la terre, le plus poétique qui soit sans doute, tout imprégné de la nature de chez nous, de l’âme du pays, de l’homme de la vieille race, enraciné dans les traditions comme un arbre centenaire dans la glèbe de la forêt. Pourtant, " Menaud, maître-draveur " r ne nous paraît pas ressembler en tous points aux romans de la terre que nous avons l’habitude de lire : Menaud est, dans toute la perfection du mot, le roman de l’appartenance, l’expression la plus sensible de l’amour pour son pays, un amour dont chacune des manifestations-un regard jeté sur la montagne, une marche en forêt, une main tendue vers une fleur-devient un véritable rite, quelque chose de sacré dont les dimensions rejoignent, profondément au cœur de l’homme, une poésie que seul un verbe grandiose sait exprimer.
Félix-Antoine Savard est sans doute le plus poète des romanciers canadiens français. C’est en découvrant la poésie de " Menaud, maître-draveur " , la poésie du sujet et celle du verbe, que nous en arrivons à pénétrer le charme du roman puis à comprendre que le livre est de ces œuvres qui, comme la race elle-même, « ne savent pas mourir »
Arrivant dans Menaud aux moments les plus intenses du drame, les nombreux rappels de Maria Chapdelaine sont d’ores et déjà devenus le leitmotiv du roman que nous présentons ici. Certaines citations, comme par exemple « nous sommes venus il y a trois cents ans et nous sommes restés Â… Autour de nous des étrangers sont venus qu’il nous plait d’appeler des barbares ! Ils ont pris tout le pouvoir ! Ils ont acquis presque tout l’argentÂ…. », puis « ces gens sont d’une race qui ne sait pas mourir », se présentent régulièrement dans le roman de Mgr Savard pour marquer le rythme même de la vie intérieure de ses personnages principaux et pour donner à leur aventure sa valeur dramatique.
(1) un prélat domestique est au service d’un dignitaire ecclésiastique pour une période déterminée.
(2) Camille Roy (1870-1943) a été le premier critique littéraire québécois du XXème siècle. Il a occupé au cours de sa carrière des postes importants en particulier dans l’éducation. Il a travaillé à l’épanouissement des lettres au Québec, en valorisant le classicisme et la clarté de la langue française tout en critiquant le style ampoulé des orateurs canadiens.
(3) Lionel Groulx (1878-1967) était un prêtre catholique, historien, écrivain et nationaliste québécois, plus connu sous le nom de chanoine Groulx. Il développe la théorie selon laquelle le seul espoir de survie du Québec est d’encourager un Québec français et catholique comme rempart à la puissance anglo-protestante du Canada anglais.
(4)André Major est un journaliste et un critique littéraire montréalais
(5) André Brochu est un poète, romancier et essayiste québécois né en 1942.
(6)) « Trente Arpents » est un roman québécois publié par Philippe Panneton en 1938 qui raconte la grandeur et la décadence du héros paysan Euchariste Moisan. Dieu, la terre et le progrès forment la matrice de ce livre.
Le monument L'Homme-rivière rend hommage aux draveurs. Il est situé entre le 67 et le 71, rue Sainte-Anne, à côté de l'Édifice Price, dans le Vieux-Québec. Inauguré en 2002, le monument est une oeuvre de Catherine Sylvain et Lucienne Payan-Cornet.
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